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CREATURES : Interview de Sparda

Sparda nous présente CREATURES et son premier album, “Le noir village”. Fan de horror metal, cet album très théâtral devrait vous ravir.

Salut Sparda, merci de bien vouloir répondre à cette interview.  Tu es l’unique personne derrière le groupe qui se nomme CREATURES. Le noir village est sorti il y a tout juste une dizaine de jours. Peux-tu nous présentez ce groupe pour les personnes qui ne le connaissent pas encore ?

CREATURES est un one-man-band comme tu viens de le dire, donc je suis tout seul, je fais du horror metal, j’aime définir ma musique comme ça parce qu’en fait je mélange beaucoup de style.
C’est majoritairement du black metal mais il y a des passages doux, des passages death des passages thrash, il y a même des passages ambiant, symphoniques etc.
J’utilise beaucoup d’instruments un peu atypiques du metal à savoir de la thérémine, pour ceux qui ne connaitraient pas c’est le premier instrument électronique, c’est ce qu’on entend dans les vieux films d’horreur, qui fait un son un peu informatique.
J’utilise également pas mal d’orgue, de piano, quelques instruments folkloriques, du violon, du violoncelle ect.

J’ai cité le horror metal car le dénominateur commun de toutes mes chansons c’est le concept et l’ambiance horrifique.
Il s’agit d’un concept-album, donc je vais raconter une même histoire du début à la fin, une histoire qui se suit, avec des personnages qui vont évoluer, qui vont interagir entre eux et tous ces personnages sont interprétés par des chanteurs différents. J’ai la liste sous les yeux, on doit être une dizaine de chanteurs.

De mon côté je joue de tous les instruments et en tant que chanteur j’interprète un seul des personnages. Toute la musique va vraiment soutenir les compositions dans le sens où, par exemple si c’est un passage où il y a un combat, se sera donc un passage assez énervé, s’il y a par exemple une cavalcade à cheval, ça va être des rythmes en triolet pour rappeler les pas du cheval, s’il y a un passage avec un rituel, ce sera une musique plus ambiancé, etc.
C’est vraiment une sorte de pièce de théâtre musicale que je propose. Pour expliquer un peu le concept en gros : c’est un village au XIIème siècle, un village paysan qui est attaqué par divers monstres et au fil des chansons je raconte ce que vit ce village qui s’appelle le Cloaric et l’album se nomme “Le noir village“.

J’ai pu voir que tu avais sorti une démo en 2008 : Horror Freak de manière assez confidentielle/anonyme. Est-ce que cette première demo, ce premier album t’a permis justement de réorienter ce qu’est devenu le groupe ou est-ce que vraiment c’était pour toi un peu un  « bac à sable » où tu allais voir ce qu’allait devenir plus tard l’album qui vient de sortir : Le noir village ?

Oui, c’était totalement de l’expérimentation. En fait je commençais quasiment tout juste la musique, ça ne faisait que 2 ans que je jouais avec mon groupe Hanternoz, avant cela je ne pratiquais même aucun instrument avant 2006. C’était vraiment tout nouveau, je voulais faire un truc un peu tout seul, pouvoir me lâcher donc j’avais fait cette démo qui avait déjà un concept en fait : de faire une chanson sur un monstre à chaque fois. Ce n’est pas une même histoire en continu, c’est 6 histoires séparées. Et étrangement c’est aussi du horror metal mais c’est inspiré de musiques de jeux vidéos retro, donc c’est un peu bizarre comme concept, je referais pas, mais c’était assez marrant, je savais pas de toute façon où j’allais à cette époque-là.

Et oui, c’était comme tu dis, une petite démo sans ambition, elle était juste téléchargeable. Moi j’ai fait 10 copies physique, j’en ai même encore… Mais voilà c’était de l’autoproduction, avec des trucs imprimés à la maison, ce n’était vraiment pas une sortie qui a eu beaucoup d’échos donc c’est pour ça que vraiment le premier album c’est celui que je propose là et il a mis du temps à être fait.

Comme tu l’as dit, tu es multi-instrumentiste, tu joues de beaucoup d’instruments bien différents. Est-ce que tu le fais justement parce que tu veux apprendre à maitriser plusieurs instruments pour gérer ton groupe à toi tout seul ou est-ce que c’est plutôt une obligation pour toi ?

Oui, c’était totalement ça, j’ai vraiment par exemple commencé la guitare… alors pour un site spécialisé sur la guitare c’est peut-être insultant (rire), mais la guitare je l’ai fait un peu par obligation, dans le sens où je voulais pouvoir faire mes compositions tout seul. Donc à l’origine j’avais commencé par la basse et j’ai appris la guitare pour pouvoir tout gérer moi-même.
Ce n’est pas un instrument qui m’intéressait plus que ça à l’origine et finalement ben c’est toujours très agréable d’apprendre un instrument. Je me suis aussi spécialisé un peu plus sur le piano, j’ai appris l’orgue classique, donc l’orgue d’église. Sur l’album c’est pas moi qui fait la batterie, c’est moi qui ai composé toute la batterie mais elle est jouée par un ami, ça malheureusement c’est un instrument que j’ai jamais eu l’occasion encore d’apprendre mais peut-être que je m’y mettrais plus tard.

Et le chant pareil par obligation dans le sens où je voulais faire tout tout seul, donc je m’y étais mis. Après je collectionne aussi beaucoup d’instruments du monde, je suis passionné par la musique folklorique, un peu de toutes les cultures du monde surtout l’Asie et de l’Orient. Donc il y a énormément d’instruments que je joue sans être expert sur certains instruments parce que forcément en s’éparpillant on arrive pas à être extrêmement bon dans un instrument.
Donc tu as dû l’entendre sur la chanson « À l’orée du Mal, le Pacte interdit » il y a un long passage d’Ambiant et sur ce passage-là il y a énormément d’instruments que je joue : ce sont les instruments du monde que je fais, donc il y en a du Tibet, il y en a d’Iran, de Mongolie etc.

Alors justement on va parler de cet album, on va aller au tout début. Est-ce que tu peux nous dire justement quand est-ce que tu as commencé à composer l’album et quels étaient tes objectifs à ce moment-là ?

Du coup la démo est sortie en 2008, j’avais déjà commencé des chansons avant que la démo sorte, donc ça devait être courant 2008 que j’ai commencé à composer l’album. L’ambition c’était de faire quelque chose pour vraiment m’exprimer totalement librement et faire quelque chose d’assez ambitieux. Des fois je me disais : « Ce serait intéressant de mettre de la trompette à cet endroit-là » et à ce moment-là je ne me posais pas la question « comment je vais faire pour enregistrer la trompette, est ce que ça va être joué par un trompettiste, est ce que ça va être compliqué à enregistrer ? »

Je me suis vraiment totalement lâché sur la composition, sans aucune contrainte… Et c’était par petit bout parce que j’étais étudiant à l’époque, j’avais des choses à faire, j’avais aussi d’autres groupes.

Donc la composition c’était vraiment éparse, l’inspiration vient quand elle vient, il y avait des mois où j’étais très actif, d’autres mois où j’avais des périodes de creux où je ne composais pas. Et voilà au bout de 4 ans l’album était complètement composé sur guitar pro, donc tout était composé dans le détail et c’est seulement à partir de 2013 où là j’ai commencé à me mettre à l’enregistrement et où j’ai juste eu en gros à exécuter les compositions telles que je les avais composées.
Pour tous les instruments que je ne savais pas jouer comme le violon, le violoncelle, la trompette, etc. ces instruments-là du coup j’ai fait appel à des invités, des amis ou des gens que j’ai contacté exprès. Ce qui a fait que ça a mis encore, en plus des quatre années de composition, ça a remis encore 3 ans d’enregistrement pour faire tout ça.

La première impression que tu as en achetant un album c’est le visuel, et pour Le noir village, on peut dire qu’il en met quand même assez plein la vue, par rapport à l’artwork et au livret de 16 pages qui est dedans, au digipack… Alors quel était le mot d’ordre au niveau de l’artwork général et comment est-ce que ça s’est réalisé ?

Alors déjà par rapport à l’artwork, je suis tout à fait d’accord avec toi : je trouve que c’est quelque chose qui est vraiment très important. Moi, quand j’écoute un album, je ne peux pas m’empêcher d’avoir l’image en tête à chaque fois qui revient… Donc l’importance de ce qui est représenté, même des couleurs c’est important parce que ça conditionne en grande partie, même si la plupart des gens n’en ont pas conscience, l’impression qu’on se fait de la musique. Même au-delà, même une fois qu’on l’a acheté, quand on l’écoute… il y a des albums qu’on apprécie plus que d’autres juste à cause de l’artwork.

C’est vraiment quelque chose que je trouve très important, d’autant que dans un groupe comme CREATURES, ou les autres groupes qu’on produit avec mon label Antiq, le concept est très important. Voilà il faut vraiment que tout le reste, tout le packaging et puis les paroles etc., il faut que tout suive, il faut vraiment que tout soit au service du concept et de la musique. Donc comme pour le reste j’ai essayé d’être très ambitieux, je voulais avoir une peinture faite exprès pour cette cover et je voulais, comme l’histoire dans les chansons est très importante, je voulais un dessin différent par chanson qui illustre.

Pour ça , j’ai fait appel à Simon Hervé, un très bon ami qui a fait les beaux-arts et qui s’en était fait viré parce qu’il était un peu trop punk (rires), qui a conservé un énorme talent qu’il avait acquis bien avant les beaux-arts, c’est un très bon artiste et je suis extrêmement content de sa peinture parce que je lui ai dit : je voudrais un panorama du village, je lui ai donné beaucoup d’indications sur l’architecture à l’époque etc. pour qu’il fasse quelque chose qui ne soit pas anachronique par rapport au XIIème siècle, au Moyen-Age. Je lui ai dit ce que j’avais en tête et c’est hallucinant, il a vraiment retranscrit ce que j’avais en tête c’est exactement ça. J’ai très peu eu à lui redire « Met ça plutôt là. » ou « Change comme ça… ».

Et après le design, parce que lui il faisait les dessins, j’avais la peinture et les dessins en brut, après il y a tout le design du digipack et du livret, ainsi que le logo qui ont été fait par Camille Roudier, un autre ami avec qui on travaille depuis longtemps avec mon label Antiq. Et là aussi, il a vraiment réussi à bien mettre en valeur le travail de Simon et le résultat j’en suis vraiment très content là aussi.

L’album commence avec en premier titre : « L’Horreur Des Lunes Pleines », qui comporte une intro en arpège en guitare acoustique où tu as une voix en français qui explique le contexte de l’album un peu comme un conte. C’est quelque chose d’assez rare, la dernière fois où j’ai entendu ça, c’était un groupe français qui s’appelait Furia avec l’album « La quête du passé ». Et c’est quelque chose de vraiment assez rare. Et donc pour toi, est ce que tu vois cet album comme un album justement concept, comme un conte, ou est-ce que tu vois cela d’une manière différente ?

Alors je ne connais pas du tout le groupe que tu as mentionné je suis désolé pour eux. Mais oui c’est exactement ça, c’est complétement un conte, c’est vraiment une sorte d’aventure musicale dans le sens où il n’y a pas juste de la musique, c’est vraiment un conte avec des personnages et avec une musique qui va accompagner le conte. Dans la biographie, on compare à un opéra plus qu’à une pièce de théâtre parce qu’il y a des chanteurs qui interprètent des personnages, avec la théâtralité que ça comporte, donc je vois un peu cet album comme un conte, comme un opéra.

Cette manière de travailler, de composer la musique et l’histoire m’a été inspirée par King Diamond, qui pour le coup fait aussi du horror metal, mais sa musique c’est purement du heavy metal mais comme il y a une ambiance horrifique c’est un peu le même genre de concept et justement il fait à chaque fois : un album, une histoire, sauf que là c’est lui qui interprète tous les personnages en faisant des voix différentes, il a un côté un peu burlesque comme ça. Il y a très peu de groupes qui font ça et je voulais un peu du coup reprendre ce flambeau-là mais avec une musique black metal parce que je trouve que ça s’adapte bien à l’horror.

On va un peu parler justement des inspirations, tout du moins des inspirations que moi j’ai pu détecter, tu vas me dire si je suis dans le bon ou dans le mauvais. Et donc au niveau des inspirations j’ai un peu entendu des choses que j’ai pu entendre auparavant dans des groupes comme TARTAROS, THE VISION BLEAK, GLOOMY GRIM, DIABOLICAL MASQUERADE et même un peu des samples de jeux vidéo voire même du Diablo alors est-ce que c’est possible ?

Alors oui (rires) tout à fait pour GLOOMY GRIM oui ça fait partie des groupes que j’apprécie. TARTAROS malheureusement j’ai découvert après avoir composé l’album mais c’est exactement le genre de musique que j’ambitionnais de faire. THE VISION BLEAK également, je connais assez peu mais ce que j’en ai écouté oui, ça me faisait aussi penser à ça, CREATURES ressemble aussi.

Et pour les jeux vidéo ben oui, très bien vu pour Diablo, effectivement le riff d’intro de « À l’orée du Mal, le Pacte interdit » en effet il y a les deux accords du début de Tristram… Je suis un grand fan de Diablo II, j’y ai passé toute mon adolescence et c’était en même temps une manière de faire un petit clin d’œil à la démo qui elle s’inspirait de musiques de jeux vidéos rétros. Je n’étais pas sûr que les gens saisiraient la référence mais bravo.

Tes sources d’inspirations musicales viennent principalement de King Diamond. Toutefois, comme le premier album / démo traitait des jeux vidéos, est-ce ces derniers sont également une source d’inspiration ? Je pense notamment aux B.O de jeux comme Resident Evil, Silent Hill ou encore Parasite Eve.

Tu cites mes séries de jeux préférées (j’aurais également pu ajouter l’incroyable Forbidden Siren) !

L’horreur vidéoludique est en grande partie ce qui a façonné mon imaginaire depuis l’enfance. Je suis un grand fan du compositeur Akira Yamaoka (Silent Hill) et il est clairement une influence majeure pour l’ambiance malsaine de l’album, même si à aucun moment je ne joue d’ambient/indus similaire. Je me suis directement inspiré de la BO de Resident Evil 1 (playstation, 1996) pour composer l’interlude symphonique sur la chanson “Martyre d’un Tanneur”.

Quelques autres références discrètes au jeux vidéo ont été glissées dans l’album pour faire hommage à la démo, aux auditeurs de les trouver !

Alors par rapport justement au thème principal, comme tu l’as dit tu as le concept, donc ça se passe dans un village paysan du XIIème siècle qui est en proie à des monstres. Est-ce que l’auteur peut être vu comme étant le personnage principal ou pas vraiment ?

Pas vraiment parce que en fait à chaque chanson correspond un monstre et du coup un personnage, donc moi je n’interprète qu’un de ces personnages. Après je ne me sens pas plus central qu’un autre, peut-être même moins, car moi j’interviens que sur le premier titre. Donc non je pense que le personnage principal c’est plus en fait le village qui est le centre de l’histoire et on va dire le personnage féminin qui s’appelle Eléonore, on se rend compte au fil de l’album qu’elle est vraiment centrale même si la chanteuse qui l’interprète n’intervient que sur une chanson ou deux. On se rend compte que c’est vraiment elle le centre de l’histoire.

Après je laisse un peu de mystère pour ceux qui voudraient lire et relire les paroles pour bien comprendre toutes les interactions et les mystères qui s’y passent.

Et donc, comme tu l’as dit auparavant, il y a 6 titres, chaque titre à un chanteur différent. La dernière fois que j’ai entendu ça, c’est avec un groupe qui s’appelle Bitter Frost  où il y a également plusieurs titres avec 12 chanteurs différents.
Pourquoi est-ce que tu as fait ce choix d’avoir un chanteur différent par titre, comment est-ce que tu as assigné chaque chanteur ? Est-ce que ça a été pour toi vraiment compliqué de réunir les bonnes personnes pour le bon titre et donc de réaliser le tout ?

Alors une petite précision : ce n’est pas vraiment qu’il y a un chanteur par titre, il y a un chanteur par personnage de l’histoire, et chaque titre est centré sur un personnage en particulier.
Effectivement dans chaque titre il y a un chanteur qui dirige la chanson mais comme les personnages reviennent des fois sur certains titres, il y a un même chanteur qui va intervenir sur plusieurs chansons : c’est plus ça l’idée.

Au niveau du choix des gens qui les interprètent, j’ai surtout en fait faire participer des amis. Il y a certains rôles où je me disais : « c’est obligé, il faut que ce soit cet ami-là ! ». Par exemple, il y a un prêtre qui intervient sur plusieurs chansons, donc lui il n’a pas sa chanson à lui, et pour ce prêtre j’ai fait intervenir Géraud de Verenhe, c’est le chanteur de BORGIA.
BORGIA est un groupe de black/death qui malheureusement n’existe plus, originaire de Paris et qui faisait de la musique sur un concept qui était la décadence de l’Eglise au Moyen-Age.
C’était de la musique vraiment empreint de religieux. En plus Géraud de Verenhe est très théâtral quand il chante, il fait souvent des voix déclamées, et il était donc parfait pour ce personnage.
J’ai immédiatement pensé à lui et il a accepté. Voilà, à chaque fois ça se passait un peu comme ça.

Après sur “le comment est-ce que tout cela s’est passé”, c’était un peu compliqué.
J’avais ma vie, eux la leur, c’est ça qui était un peu compliqué de réunir les personnes une par une pour faire les enregistrements.
C’est une raison qui fait que l’album a pris beaucoup de temps, du fait que je me sois entouré de plein d’invités et que cela prenait du temps à tous les enregistrer.
Et par rapport au rendu final, c’est peut-être même un des regrets que j’ai un peu sur cet album-là.

Comme ce que je voulais c’était des voix théâtrales, il y a des personnes qui ont l’habitude de chanter mais qui n’ont pas l’habitude d’interpréter des personnages, et d’intérioriser leur histoire et de bien la retranscrire. Donc pour certaines personnes ça a été assez déstabilisant de devoir comme ça intégrer un personnage et il y en a qui s’en sont mieux sorti que d’autres.
C’est peut-être aussi dans ma manière de travailler, je les ai fait venir des fois ils ne connaissaient pas le morceau, ils ne connaissaient pas les paroles, ils découvraient…

J’aurais peut-être dû d’abord leur envoyer tout, leur dire ce que je voulais pour qu’ils s’approprient un peu plus le morceau.

C’est un peu le problème quand on a un one-man-band, c’est qu’on fait tout tout seul, on a des idées très finies sur ce qu’on veut et c’est dur des fois de faire comprendre aux personnes pour qu’elles retranscrivent ce qu’on a en tête.

C’est pour ça que je disais tout à l’heure que j’étais très content des peintures et de l’artwork car ils ont exactement réussis à faire ce que j’avais en tête.
Pour le chant c’était un peu plus compliqué parce que la personne n’a pas forcément la voix complétement adapté à ce que moi j’avais en tête. C’était vraiment un travail particulier, aussi bien pour eux que pour moi. Mais au final je suis quand même très content du résultat et je suis très content d’avoir fait participer tous ces amis.

Ce qui est magnifique avec ce premier album c’est qu’on ressent une alchimie qui se dégage de chaque instrument et de chaque titre, avec chaque personnage. Globalement on sent que tu as travaillé les choses, que les choses sont liées, qu’il y a une place, un endroit pour chaque personnage, pour chaque riff. L’écoute est assez simple mais chaque nouvelle écoute permet de trouver des détails supplémentaires à chaque réécoute.

Oui effectivement je voulais aller dans le détail comme tu dis. Je suis tout à fait d’accord avec toi dans le sens où les albums que je préfère, je me rends compte dans les groupes que j’écoute que ce soit Krallice, The Ruines of Beverast, Dodheimsgard, Arkha Sva…
Ce sont des groupes où les albums j’ai pu les écouter 50 fois, la 51ème fois je vais toujours découvrir un truc. Je vais me dire : Ah, j’avais jamais remarqué qu’à tel endroit la guitare faisait ça ou la basse : il y a un petit riff sympa ici. J’adore vraiment ces albums qui se découvrent vraiment avec le temps.

Et du coup c’est n’est pas forcement ce que j’ai voulu faire dans mon album mais je pense que du fait de mes influences c’est quand même ce que j’ai créé. J’ai vraiment essayé d’avoir beaucoup de riffs différents, avec une patte et une atmosphère particulière pour chaque riff. Ainsi si l’on écoute le riff de guitare seul, ce dernier possède au moins un peu d’intérêt car au final je n’ai mis quasiment aucun riff bateau.

Et c’est peut-être même un défaut de l’album dans le sens où il est peut-être trop riche, il y a peut-être des moments qui auraient gagnés en efficacité si j’avais composés des riffs plus simples et plus efficaces, plus rentre dedans, un peu plus brute de décoffrage… Pour cet album j’ai essayé de faire les choses assez complexes.
Je pense que de fait, l’album est un peu moins ennuyeux qu’il aurait pu l’être mais il est peut-être un peu plus difficile à digérer, d’autant que les chansons sont longues, elles sont très denses avec plein d’instruments. Il y a des gens pour qui ça peut être un problème je pense, ce genre d’album.

Et justement par rapport à la durée du titre, j’allais y venir. Il n’y a aucun titre qui fait moins de 7 minutes. Tu as plusieurs émotions, plusieurs facettes dans chaque titre. Est-ce que tu penses, maintenant que l’album est sorti, que tu aurais eu peut-être un impact plus grand si tu avais tout simplement coupé certains titres ? Au lieu d’en avoir 6 par exemple en avoir 8 ou 9, pour justement bien découper chaque phase, chaque transition ? Est-ce que tu penses que ça aurait été plus bénéfique ou non ?

Je pense oui que ça aurait été bénéfique. Après lorsque je composais les chansons j’avais déjà le squelette de l’histoire en tête et je composais : « Là il faut un riff qui sonne comme ça, là qui sonne comme ça… »

Je composais en fonction de l’histoire, et c’est vrai que des fois l’histoire est plus ou moins longue. Mais ce que j’aimais avec ce projet-là, et le fait d’être tout seul, c’est de pouvoir faire une musique sans concession, c’est-à-dire voilà si là je jugeais que c’était pertinent de mettre un duo violon-violoncelle pendant 4 minutes, même si ça va aliéner les auditeurs ben ce n’est pas grave, c’est moi qui décide.

Et c’est pour ça qu’il y a des titres qui peuvent être très très longs. Je pense effectivement que l’album serait plus facilement écoutable si les chansons étaient plus courtes et un peu plus simples, mais l’idée était vraiment de faire ce que je voulais et comme je disais de réaliser un album sans concession.

Par rapport aux titres, comme tu le disais il y a beaucoup d’instruments différents et il y du violon qui ressort en interludes. On peut également noter que tu utilises beaucoup de samples différents par rapport à l’environnement, que ce soit des gouttes de pluie, que ce soit des grincements, des cloches ou des cris. Est-ce que tu voulais vraiment mettre en avant une ambiance globale, via les samples ou est-ce que tu aurais préféré la mettre en avant uniquement avec la composition ?

Alors pour les samples c’est vrai que pour les gens qui s’intéressent vraiment juste à la musique c’est quelque chose qui peut faire sortir de l’expérience musicale car, il faut le dire, un sample est rarement joli à écouter et n’apporte rien à la composition en elle-même.
Le but est encore une fois d’appuyer le concept et l’histoire. Là où tous les riffs ont été composés pour appuyer l’histoire, les samples eux rajoutent encore une couche de compréhension de ce qui se passe.

Par exemple sur la première chanson « L’Horreur des Lunes Pleines » quand l’homme se transforme en loup et qu’il va dans le village, là on entend d’abord des bruits de douleur, des bruits de craquements des vêtements, après on l’entend hurler un cri de loup et ensuite on l’entend courir dans le village et là on entend les bruits d’abord de pas dans la forêt puis dans l’eau quand il traverse la rivière puis des bruits de pas sur la terre battue et enfin on entend la porte qui s’ouvre avec le cri du loup-garou. Donc oui c’est vraiment pour appuyer l’histoire une fois de plus et qu’au final en fait, même si on n’a pas les paroles, juste avec la musique et les samples, on peut comprendre déjà en gros ce qu’il se passe. C’est bien comme ça pour les gens qui sont non francophones et ça rajoute vraiment je pense, au moins ça va intriguer les gens, il faut que ça donne vraiment un intérêt supplémentaire et une ambiance supplémentaire.

Là, la plupart des samples en gros c’est des samples que soit j’ai fait moi-même, soit j’ai trouvé sur internet et j’aimerais bien pour le prochain album que ce soit encore mieux en travaillant avec quelqu’un qui est sound designer pour le cinéma, c’est-à-dire qui crée les samples lui-même… Je pense que je pourrais vraiment faire ce que je veux, c’est une idée fixe.

D’accord, et par rapport justement à ces descriptions tu me fais en fait vraiment penser au premier album de GLOOMY GRIM : « Blood Monsters Darkness » où il y a justement beaucoup de samples. Est-ce que justement c’était un lien par rapport à cet album-là ou est-ce qu’il n’y a pas vraiment de lien ?

Pas vraiment un lien direct à cet album-là après il fait partie de mes références et non encore une fois je reviendrais plus sur KING DIAMOND comme je le disais tout à l’heure, là aussi il y a pas mal de samples qui s’ajoutent à la musique pour rendre l’histoire encore plus explicite, encore plus vivante.

Au niveau de la production, quel était ton mot d’ordre, quel genre de production est-ce que tu voulais avoir, plutôt quelque chose de « black raw », quelque chose de plus clair, de plus mystique, quels étaient vraiment tes mots d’ordre et qu’est-ce que tu as fait justement pour mettre en place la production, avec qui est-ce que tu as travaillé ?

Ben là encore, comme c’est un one-man-band je voulais tout faire tout seul donc j’ai enregistré tous les instruments moi-même avec mon home studio, je suis pas du tout rentré en studio pour cet album-là. Après c’était plus par facilité vu que je suis, comme je le disais tout à l’heure, comme je suis éparpillé sur plein d’instruments, je ne suis pas hyper bon et hyper efficace sur chacun des instruments, j’ai dû m’y reprendre à de nombreuses fois pour les prises et comme ça j’ai pu prendre mon temps en faisant tout tout seul. Et j’ai travaillé le son de manière à avoir la chose la plus claire possible, surtout vu le nombre d’instruments qu’il y a, je voulais vraiment que ce soit le plus clair possible. Je n’ai vraiment pas voulu faire quelque chose de raw, de black… Après ça sonne quand même un peu raw justement parce que ce n’est pas fait en studio et c’est pas fait avec des professionnels mais j’aime bien, je trouve que c’est un bon compromis, le son est assez clair, assez puissant tout en gardant quand même une empreinte… C’est un premier album, ça reste un groupe assez underground, ce n’est pas le dernier Metallica ou une prod Nuclear Blast, donc je suis quand même content de garder ce côté un peu underground qui fait aussi un peu la patte de mon label Antiq. Et après le son je l’ai donné à I Luciferia de Reverence qui est une assez vieille connaissance, donc lui il a retravaillé pour essayer d’en sortir le meilleur. Donc le son si vous le trouvez un peu raw s’est plus subi que voulu mais moi je suis très content du résultat.

Tu as ton propre label : Antiq. Est-ce que le fait justement d’avoir ton propre label ça t’a réellement aidé justement d’une part à produire ton album, d’autre part à lancer la promotion de l’album ?

Ce label je l’ai créé avec Hyvermor, mon ami avec qui je travaille dans HANTERNOZ qui est un groupe de black folk qu’on a en commun. On a créé ce label pour pouvoir tout faire tout seuls, du début à la fin, qu’on puisse vraiment gérer le concept, faire des choses sans compromis. Ce label on a tenté de l’utiliser pour tous nos autres groupes, qu’il a dans son coin ou que moi j’ai de mon côté et qu’on a ensemble, ainsi que d’autres groupes parfois d’amis. Toujours autour d’un concept, la plupart du temps un concept historique, comme le projet REGIMENT qui est un concept sur la première guerre mondiale, HANTERNOZ qui fait du black folklorique avec un concept que le folklore et l’histoire de Bretagne. Il y a aussi Projet Ê auquel je participe qui a un concept sur les mythes et l’histoire sumérienne et akkadienne.

Et donc c’était parfait pour CRÉATURES, le concept moyenâgeux je l’ai peut-être créé en partie parce que ça correspondait à Antiq, il y a peut-être une espèce de symbiose qui s’est faite d’influences mutuelles, entre Antiq et CRÉATURES, qui fait que ça donne cet album avec un concept sur l’horreur au Moyen-Age.

Et oui, c’était bien, vu que CRÉATURES est un one-man-band, j’ai pu créer toute la composition jusqu’à la production, j’ai pu tout gérer moi-même. Donc c’était vraiment une facilité, là au moins on pouvait vraiment mettre le paquet niveau promotion… Là où, quand on est signé sur un autre label on sait jamais trop à quoi s’attendre, des fois on se retrouve en back catalogue, le label fait pas du tout de promo et notre album il passe totalement inaperçu. Là au moins, on peut s’en donner les moyens.

Alors l’album est sorti il n’y a pas très longtemps, quelle est ta « stratégie » pour promouvoir l’album ? Tout en sachant que de nos jours pour promouvoir un album il faut tourner, il faut faire des concerts et que toi, tu ne peux pas étant donné que tu es tout seul.

On fait surtout de la promo sur internet et on tient pas mal de stands à des festivals ou des concerts. On est assez au contact des gens dans l’underground. Après, comme le label existe depuis quelques temps, et qu’on a des groupes avec des concepts forts… On s’est créé vraiment une identité, il y a quand même, au fil des années, des gens qui se sont mis à nous suivre avec attention, donc oui je pense qu’avec cette production-là ont satisfait les afficionados de Antiq.

Effectivement je ne peux pas faire de concerts en étant tout seul, mais si l’album rencontre suffisamment de succès, peut-être que si je trouve des musiciens assez motivés et disponibles je vais essayer de monter un set pour des live. Mais même cela risque d’être assez compliqué car l’album est très riche et il y aura énormément de choses à apprendre pour tous les membres. De plus il faudrait aussi adapter les morceaux parce qu’il y a plein de choses qui ne peuvent pas être jouées en live, et on ne peut pas être 15 sur scène.

Ce serait compliqué mais c’est quelque chose que je garde vraiment en tête, et si ça peut se faire je n’hésiterais pas une seconde.

Par rapport au futur, est-ce que l’on peut espérer voir d’une première part d’autres vidéo clips ? Et d’autre part, est-ce que tu penses déjà à réaliser un second album ?

Je ne pense pas faire un second clip car je n’ai pas les connaissances requise pour faire de la vidéo et je n’ai personne dans mon entourage qui est suffisamment bon pour m’aider. Je pense que ce serait compliqué, les clips c’est assez casse gueule, si c’est pas bien fait ça peut très vite rendre ridicule.
Donc je n’ai pas trop envie de me lancer dans un clip. J’ai fait une preview de l’album en vidéo mais j’ai fait quelque chose d’assez sobre et d’assez simple, justement pour ne pas trop tomber dans le ridicule. Donc un clip non je ne pense pas, après dans le futur…

Pour l’instant je vais me concentrer sur d’autres groupes : HANTERNOZ mon groupe de black metal folklorique breton prépare un split et un album et j’ai donc déjà beaucoup de travail en ce moment là-dessus. Je vais également monter un nouveau projet d’ambiant, avec toute ma collection d’instruments orientaux et asiatiques.

Je travaillerais sur le prochain album en parallèle dès que j’aurais les idées, dès que j’aurais une guitare entre les mains et que j’aurais de l’inspiration.
J’ai déjà pas mal d’idées par rapport au concept et les gens avec qui je vais travailler, je pense même travailler avec un ami écrivain pour créer une nouvelle, qui sera une sorte de thriller médiéval. Le concept de l’album reprendrait cette nouvelle et les paroles écriraient différemment l’histoire.

Suite à la sortie de l’album, j’ai vu que tu avais déjà eu des retours globalement positifs. Mais de ton côté, si c’était à refaire, est-ce que tu aimerais refaire certaines choses ?

Je suis un très gros perfectionniste, quasiment maladif… C’est pour cela que l’album a mis presque 8 ans à sortir. Donc oui, j’aurai toujours quelque chose à revoir, je ne serai jamais complètement satisfait de ce que je fais, mais c’est vraiment du détail. Je n’ai que peu de regrets sur cet album. Si c’était à refaire je pense qu’il n’y aurait pas grand-chose qui changerait au final.

L’album est disponible en cd digipack et en digital, est-ce que tu prévois d’autres formats ?

La seule vraie version, à mon goût, est pour l’instant la version en digipack. L’album coute 12 euros en digipack, ce qui n’est pas énorme du fait qu’il y a un gros livret 16 pages très bien fait. Pour les gens qui habitent à l’étranger, avec les frais de port ça revient cher.

Je voulais quand même rendre l’album accessible à ceux qui le voulait en digital et il y a aussi des gens qui n’achètent juste pas de cd, qui aiment juste avoir de la musique sur un téléphone.
Je voulais juste rendre la musique accessible pour ces gens-là.

De mon côté je vois la version digitale comme une roue de secours, pour moi ce n’est pas une version officielle, j’ai du mal avec la musique en digital… Parce que sans le livret, sans la pochette et tout on se coupe une grande partie de l’album, l’album n’est pas ce qu’il est si on a pas tout ça à côté.

Pour ce qui est des autres formats, peut-être plus tard viendra un vinyl. Il y a déjà quelques personnes qui seraient intéressées pour avoir un vinyl, mais ce n’est pas encore à l’ordre du jour car les vinyls coutent très chers à produire et donc on va se mettre à chercher un autre label qui voudra bien le sortir en vinyl.

En plus l’avoir en grand format, la peinture, ça serait très bien. Il y a également quelques produits dérivés qui vont bientôt arriver, j’ai fait faire des T-shirts et des sweats qui vont être très jolis, imprimés devant et derrière. Et je pense aussi faire bientôt des posters pour avoir la cover en grand pour les gens qui le désirent.

Créatures semble être l’unique représentant de horror metal dans l’Hexagone. Est-ce une réalité ou la majorité des groupes de ce courant sont-ils uniquement connus de la scéne underground ?

Je trouve même que l’horreur est très peu représentée dans la scène metal de manière générale, lorsqu’on doit citer des groupes on en trouve généralement que 4 ou 5.

Pourtant c’est un concept qui correspond très bien au metal dans tous ses sous-genre : de King Diamond (heavy) à Portal (death/doom/black) en passant par Notre Dame (black/indus).

On retrouve d’avantage l’horreur dans l’ambient, l’indus, le goth, les BO de film etc. WORMFOOD, formation parisienne, possède toutefois une ambiance horrifique. Avec Créatures j’espère pouvoir un peu combler ce vide.

Merci à toi et bonne continuation !

CREATURES

Site web : http://creaturesfr.bandcamp.com/
Page Facebook : https://www.facebook.com/creatures.horror/?fref=ts

Silenius

Gérant du site.

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