Votre nouvel album apporte un gros lot de nouveautés comparé aux précédents albums, avec des structures plus directes, simples et efficaces et des grooves un peu différents, avec un rendu global plus accessible. Comment s’est faite cette évolution ?
C’est dur de décrire la composition d’un album, c’est surtout dans quel état d’esprit on est lorsque l’on compose, on a passé beaucoup plus de temps sur la compo de Magma que sur les albums précédents, et on voulait faire quelque chose de fini.
Souvent après un album on est un peu insatisfaits, on est tout le temps un peu insatisfaits tu vois (rires). Il y a toujours des trucs à revoir ou sur lesquels on aimerait revenir.
Là on a travaillé pour faire des morceaux plus simples, c’est assez nouveau pour nous.
Nous on aime bien prendre cette direction. Joe qui a commencé à chanter, il a voulu essayer d’autres pistes car gueuler, il commence à en avoir un peu marre. Il a voulu essayer autre chose, c’est bien, on se lance dans quelque chose de nouveau.
Il y a justement beaucoup de chant clair sur Magma
Joe chante depuis des années tout seul chez lui, il expérimente autre chose que GOJIRA. Sur les morceaux que tu viens de citer, il s’essayait, il avait envie d’exprimer cette part de lui, en tant que chanteur et non pas de gueuler en tant que métalleux. Nous on adorait ça, on le pousse d’ailleurs depuis des années à lui dire écoute, essaie de chanter…
C’est pas facile quand t’as 17 ans que tu te mets dans un groupe et que tu gueules, tu fais du metal, pour lui c’est vraiment pas évident. Mais effectivement ça part d’une envie qui est déjà là depuis des années, on n’a pas pris un tournant direct, ça s’est fait petit à petit. Il y a des critiques, des gens qui ne comprennent pas trop, puis il y a des gens qui découvrent le groupe et qui adorent ce tournant.
Est-ce que tu me rejoins dans l’idée que Magma
C’est un peu ce qui se passe oui, après on a toujours réagi comme ça sur chaque album. On ne s’est jamais posé la question finalement de comment l’album allait être perçu. Enfin, un peu quand-même, on est obligé, on a quelque chose à présenter, mais c’est pas la finalité. Sur chaque album, on s’est dit “on a envie de faire ça, on fait ça, point barre !”
Et puis avec votre niveau de notoriété, vous êtes aussi en droit de faire ce que vous voulez, non ?
Ouais c’est vrai, et puis on ne fait que de la musique finalement, faut pas trop se prendre la tête sur les tenants et les aboutissants. On fait de la musique et le but c’est juste de kiffer, de prendre son pied et il y a des gens qui vont comprendre, d’autres pas…
Justement, par rapport à ce type d’évolution, quand j’écoute des titres comme “From Mars” ou “Born in winter” je me dis que ce genre de titres pourrait se prêter à des adaptations ou un album acoustique, l’avez-vous déjà envisagé ?
On va faire un unplugged peut-être, ça serait une bonne idée ! (Rires)Oui on y a pensé, on a fait des essais je me souviens notamment d’un morceau qui s’appelle “Wisdom comes” et on avait fait dans le van un délire entre nous, on était 10 dessus, il y avait quelqu’un qui tapait sur le siège, le klaxon, une gratte sèche, Joe qui murmurait et ça rendait hyper bien.
Un peu à la façon du collectif suédois de Sound of Noise ?
Ouais c’est ça, et ça marche, ya des trucs sympa.
Mais oui effectivement il y a des morceaux qui s’y prêtent, il y a des reprises, on entend souvent des mecs qui font des reprises acoustiques de GOJIRA. Là notamment on a écouté une fille qui chantait sur du clavier, c’était hallucinant…
Il y aurait des choses à faire, mais on en fait déjà pas mal !
Tu peux nous parler des effets que vous utilisez ?
Quand je vois des gratteux avec dix pédales c’est hallucinant. Notre musique est très directe, y a pas vraiment d’effets.
En comparaison de “From Mars to Sirius” qui sonnait plus froid, votre son s’est réchauffé, il est devenu plus organique non ?
Mais par contre c’était l’idée, de mettre un micro et de retrouver le rock un peu dans le son, quelque chose de rock ‘n’roll et je pense que ça a bien fonctionné.
L’écoute de Magma
On voulait quelque chose de simple, ce qui est contradictoire c’est que la simplicité il faut aller la chercher, il faut la retrouver, parce que quand on est gamin, on a juste envie de jouer, et pas de se prendre la tête !
Là on a fait condensé, quelque chose de simple d’harmonieux et du coup ça demande beaucoup plus de travail.
C’est toujours plus dur d’en enlever que d’en rajouter !
Exactement !
Tout en proposant des morceaux plus courts et plus simples, cet album demande plus d’écoutes avant de bien rentrer dedans je trouve non ?
Ah ouais c’est sûr, même moi il m’a fallu plusieurs écoutes.
Avec votre studio à Brooklyn, la moitié du groupe là bas, l’autre moitié dans les Landes, ça se passe comment ?
Faut s’adapter, c’est pas si compliqué que ça.
Depuis l’arrivée de Jean-Michel, votre line-up n’a pas changé, vous ne vous prenez jamais la tête, comment ça se passe ?
Des fois il y a des embrouilles, on se prend la gueule, après on se revoit, on s’excuse, faut s’excuser aussi parce que dans la vie c’est dur de s’excuser de dire “Putain chuis désolé j’ai merdé mais on va discuter, c’est quoi le problème ?” de trouver des solutions, c’est ça la clé je pense.
Et comment vous conciliez le groupe et la vie privée ?
Et la famille c’est pareil, il faut que nos nanas soient d’accord avec cette façon de vivre, qu’elles l’acceptent, faut être solidaires mais ça se passe bien, il n’y a pas de souci par rapport à ça. Je pense que ça leur fait du bien aussi que l’on parte un mois, elles se retrouvent toutes seules, elles aiment bien aussi, elles se retrouvent un peu toutes seules à faire leur vie, il y a un côté qui est sympa aussi.
Contrairement à beaucoup de groupes de metal aux thématiques plutôt violentes, vous militez pas mal pour la protection de l’environnement, comment tu vois l’avenir de la planète à plus ou moins long terme ?
Du coup il faut être centrés sur le fait que l’on est rien, on, c’est à dire l’espèce humaine. J’ai l’impression que l’on est rien et que l’on est juste de passage. Je pense qu’il vaut mieux se focaliser sur ce qui va bien que sur ce qui va mal.
Comment je vois le monde ? Le monde ce n’est que ce qu’il y a dans ta tête, c’est la perception du monde qui existe. Le monde il est tel qu’il est, il tourne avec les gens qui sont dessus.
Et sur le plan mondial justement, y-a-t-il des pays où vous avez joué qui vous ont marqué ?
Ce qui est excitant pour nous maintenant c’est quand on joue dans des lieux où l’on a jamais joué et de voir mille, deux-mille, trois-milles personnes complètement excités, ça c’est super !
Quels conseils donnerais-tu aux groupes qui voudraient suivre vos pas ?
Nous quand on a commencé le groupe, on a tout arrêté, mes potes allaient à la plage et nous on répétait.
Vous travaillez encore à côté ?
Écoutez-vous, vous avez les clés, plus concrètement pour un groupe c’est répéter, faire des bonnes compos et faire attention que tous les membres du groupe soient satisfaits à 100%. Si sur quatre musiciens il y a un ou deux qui ne sont pas satisfaits des morceaux, qui pensent qu’il y a quelque chose qui ne va pas, il faut les écouter sinon ils vont partir et ça va merder. Il faut qu’un groupe soit vraiment uni c’est important, chacun à sa place et chacun à l’écoute de l’autre, c’est primordial.
Côté fonctionnement chez vous c’est entièrement démocratique ?
Et puis les groupes qui marchent, faut pas lâcher !
Alors on aura peut-être la chance de vous voir avec METALLICA en première partie ?
J’espère pas, on s’entend hyper bien, on s’est fait des bouffes ils nous ont invité au resto, ils sont venus nous voir dans les loges, il y a eu des jam avec James Hetfield, ils sont super vraiment. C’est pas ça, si ça se passe un jour, ce sera dans trente ans, je pense que dans trente ans j’aurai arrêté GOJIRA déjà et METALLICA à 80 ans sur scène… j’espère qu’ils auront arrêté avant !
D’ailleurs ils vont sortir un album bientôt, on peut imaginer vous revoir ensemble sur la route ?
Je ne peux pas en dire plus mais tourner avec METALLICA, c’est un honneur à chaque fois.
Ca a fait exploser votre carrière ?
Quand on fait le stade de France devant 50000 personnes ça aide ouais.
Que penses-tu justement des concerts dans des stades ?
C’est démesuré, c’est plus l’aspect évènement qui prend de l’ampleur que l’aspect concert, on focalise sur les quelques milliers de personnes qui sont là mais après on ne voit rien mais bon c’est impressionnant, il n’y a pas de mots.
Je prépare une méthode de guitare pour jouer à la façon Christian de Gojira, je travaille dessus car j’ai des demandes après les cours, les mecs qui me demandent comment retrouver ça après sur le net……ça sortira peut-être un jour mais je travaille dessus en tout cas.
Un dernier mot à nos lecteurs ?
Site web : http://www.gojira-music.com/
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Photos : Steve et Fanny Larcer-Collin : http://www.lcf-photography.com
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